I.
Lundi
2h25
Ma cigarette se consume. Ma tête
me fait mal et mes yeux tombent. Il est parti. Lui ai – je demandé de
partir ? je ne crois pas ou alors en plaisantant. On ne sait pas compris.
Je sais que ce n’est que chair, qu’il n’a pas de lendemain. Je sais que ce sera
moi ou un autre. Je sais que l’important
est le moment où il s’envole, où il part loin. Et je le regarde ...
Il est grand, beau et ténébreux.
En un seul regard, il vous emporte. En un seul baiser, il vous condamne. Je lui
appartiens dès l’instant où il franchit ma porte. Il me regarde, je tremble. Il
m’embrasse, je frisonne. Il me prend dans ses bras et il n’y a plus rien, plus
personne. Il me déshabille, me caresse et me serre contre lui. Je suis bien.
2h39
Pourquoi écrire ? Pour se
libérer ? Pour partager ? Pour créer ? Pour rien. J’ai 20 ans et
je suis dépressif. Ça sonne bien. Mais cette dépression appartient au passé
comme un certain nombre de chose que l’on refoule. Je n’aime pas le passé. Je
n’ai aucun regret. Ça ne sert à rien les regrets. Tu es parti et je m’enfous.
Je sais que tu reviendras. Je sais que c’est du passé. Je sais que je ne vais
pas regretter.
2h50
Mécaniquement, je lèche le papier. J’allume le
joint. Je fume. Je fume et je bois. Je m’enivre car je n’aime pas la réalité.
Réalité du monde extérieur. Réalité du temps qui passe, et toi, qui arrive et
puis qui s’en va. Il y a les gens pressés. Il y a les gens qui passent et que
l’on ne voit pas. Il y a les gens qui se foutent de tout. Et puis, il y a toi.
Tu me parles et tu me regardes, tu te retournes et tu t’habilles, tu te lèves
et tu t’en vas. Je ne te retiens pas. Il n’en est pas question. Le simple fait
de te laisser croire que tu me plais me retourne le cerveau. Va – t – en !
3h13
Je suis seul. Je me meurs entre
le sentiment exacerbé d’être libre et indépendant et la sensation triste de
n’avoir aucune raison de se lever le lendemain. Les jours filent, les plans et
les ex s’accumulent. Qui suis – je ? Où erre – je ? Je ne veux pas de
toi. Je ne veux pas être triste quand tu n’es pas là. Je ne veux pas
m’impatienter en pensant au fait que ce week–end , on le passera ensemble. Je
ne veux pas d’une date de rencontre. Je ne veux pas d’engueulades matinales. Et
pourtant, je pense à toi …
3h18
Saurai – je me contenter de vivre
de sexe et de vodka ? Ne tombez pas amoureux de moi sinon je vous briserai
le cœur. Cette vie là, vaut elle le coup d’être vécu ? Je suis jeune.
C’est une excellente excuse. Amour tu ne me froisseras pas ! Je n’ai que faire
de ça, je ne serai jamais à toi.
3h27
J’ai couché avec beaucoup de
garçons. J’aime les expériences. Et certaines restent. Mes mains qui te
caressent. Mon corps serré dans tes bras tatoués. Un sentiment de sécurité me
traverse l’esprit. Et je me sens libre. Je n’ai jamais été aussi libre dans les
bras d’un garçon. Des frissons me remontent le long du dos rien qu’en pensant à
tes baisers. Tu n’es qu’un plan, j’arrête.
3h41
Je suis fatigué. Ma tête tombe.
Mes yeux se ferment. Tu viens de rentrer chez toi. Tu ne me parles pas et je
crève. Je ne penserai plus à toi.. Mon lit me tend les bras. Mes bras se
tendent vers le lit. Chaque mot me pèse. Chaque lettre m’encombre. Au
secours ! Il n’y a plus rien à faire. Je m’en vais. Je m’éclipse comme tu
l’as fais. Je vais penser à moi et à ma vie passionnante.
II.
Le même jour
11h48
Les volets sont fermés. Je ne
veux pas les ouvrir. Le café réchauffé me donne des aigreurs d’estomac. Mes
poumons, à chaque cigarette, me rappellent qu’il est tant d’arrêter. Il n’y a
pas de programme, pas de projet. Encore une journée qui va passer. Encore des
pseudos rencontres virtuelles. Des gens me parlent, ils me veulent ou
m’ignorent, mais ne me connaissent pas. Quel âge as-tu ? Que cherches
tu ? On se voit quand ? Jamais. Pour que tu m’apprécies ? Pour
que tu t’attaches ? Non merci. Je ne veux pas d’un inconnu. Pas d’une
discussion stérile sur nos dernières vacances ou notre dernière histoire
d’amour. Je ne veux de personne. Si, je te veux toi !
16h32
J’ai décidé de t’oublier. Tu n’es
rien. Juste un souvenir, un bon coup. J’ai un nouveau rendez – vous. Encore un
jeune garçon. Nous allons nous rencontrer et discuter. Nous allons nous
regarder dans le blanc des yeux, angoissés par un moment de silence. Je vais
avoir envie de lui. De l’embrasser et de le caresser. Il se laissera faire et
ce sera un bon moment. Puis je le laisserai partir. Laisse – moi seul ! Je
suis bien comme ça.
16h38
Le temps passe. Mes pensées
défilent. Un homme me propose 100 euros. J’ai besoin de cet argent. Je ne veux
pas me donner à lui. Il ne me plaît pas. Il me fait peur. J’ai envi que tu sois
là. Te sentir près de moi. Et oublier. Il n’y a pas de regrets mais il y a des
souvenirs. Des gens que l’ont veut oublier. Et des gens que l’on veut revoir. Je
ne sais pas qui tu es. Je ne sais pas qui je suis. Tout va bien. Le temps
s’arrête. Le rendez – vous est reculé.
III.
Mardi
12h53
Nous avons parlé. J’attendais un
seul mot de lui et ma porte se serait ouverte. Mais nous évitons le sujet. Un
nouveau jeune homme me propose de passer. Je ne suis pas motivé, je me fous de
lui. Je lui dis oui. Un blanc énorme. Le plus long et le plus beau moment de
silence que je n’ai jamais connu avec un garçon. Il n’a rien à dire et moi non
plus. Après cela, il se permet de me sauter dessus. Je n’ai pas envi, je le
rejette, lui demande de partir. Je te retrouve sur le net. J’espère encore.
J’adore le moment où je t’attends. Je deviens alors un enfant à la veille de
noël. Entre impatience et excitation. Mais tu ne viendras pas ce soir. Je vais
me coucher. Seul.
13h07
Je n’ai plus rien à boire. Je
n’ai plus rien à fumer. J’angoisse. J’ouvre enfin mes volets et je découvre les
caprices de la météo. Voici un excellent sujet de conversation que je
m’impatiente de partager avec une de mes voisines retraitée, sénile mais
tellement gentille. Cette hypocrisie que chacun de nous partage avec ses
voisins semble naturelle. Parle – t – on de moi dans mon dos ? Des allers
– retours incessants et illogiques d’un tas de mecs de tous les âges, que je
reçois dans mon appartement ? Je m’en contre fiche. Je me casse dans un
mois. Je me casse et j’ai peur. Deux mois, loin de ma liberté et de mon
indépendance. Une abstinence presque forcée. Vais – je m’en sortir ? Je
pense que oui.
14h00
Qui veut de moi et des miettes de
mon cerveau ? Les chats et autres forums de rencontres sont morts. Je
tremble. Tu viens de te connecter. Tu ne viendras pas me parler et moi comme
d’habitude je vais te sauter dessus comme si j’étais accroc à toi. Trop
stupide. Tu ne me parles pas et tu t’en vas. Je te hais. Je t’en veux. Je te
veux Je n’y comprend rien.
00h14
Je rêve de te revoir et j’ai
tellement honte. Sors de ma vie s’il te plait. Je n’ai que faire de toi. Je
n’ai pas besoin de ça. Je n’ai pas le temps pour ça.
00h36
Je n’ai plus rien à faire sur le
net. J’ai eu mon plan ce soir. J’ai eu mes caresses. J’ai eu l’affection
nécessaire à ma survie. Tout va pour le mieux. Non ça ne va pas. Ce n’était pas
de lui dont j’avais envie. C’est toi que j’aurai aimé avoir près de moi. Je ne
pense pas que tu te fiche complètement de moi. Nombre de plans que tu as décidé
de ne plus revoir. Et moi tu es venu me voir deux soirs de suite. Deux fois, je
t’ai déçu. Tu ne me parles plus. Ecris moi. Appelle moi. Rien qu’un petit signe
suffirait. Un « bonjour». Un « tu fais quoi ce soir ? ». Mais
je rêve. Tu n’es rien. Tu te fiche de tout et particulièrement de moi.
IV.
Mercredi
10h31
Tout va pour le mieux dans le
meilleur des mondes. A un seul détail près : la vodka colle aux touches de
mon clavier. A l’ordre du jour, les Amis ! A force de baiser, de boire ou
de fumer seul, de se morfondre dans sa solitude, on a tendance à les oublier…
Ce sont les meilleurs qui viennent me voir aujourd’hui. Et je suis heureux. Ca
fait quelques jours que je n’ai pas vraiment eu de relations saines avec des
gens. On peut dire que cela manque. Mon joint se termine. Et une pensée de toi
me traverse l’esprit. Elle vient et puis s’en va. Je suis fier de moi. C’est
une bonne journée. C’est une bonne fin.